L'art et la culture dans les projets urbains contemporains : instrumentalisation et rôle des lieux de production artistique

La mobilisation de l’art et de la culture dans le cadre de projets de développement urbain et de régénération urbaine est un phénomène largement observé depuis plus d’une vingtaine d’années. On parle notamment de culture-led regeneration. La culture et l’art émergent ainsi comme un outil clé dans l’arsenal de régénération et de promotion d’un lieu, ce qui reflète également leur importance plus large dans les changements du paysage économique du capitalisme contemporain.

Différentes utilisations des arts et de la culture sont possibles, et elles diffèrent selon les lieux et leur histoire, les acteurs qui les mobilisent et leurs objectifs. On distingue ainsi différents « régimes urbains de l’art », où les régimes sont définis comme des systèmes de gouvernance locale. Mon travail consistera à décrire ces différents régimes contemporains et à comprendre comment et pourquoi ils sont apparus, et quels sont leurs transformations actuelles.

D’une manière générale, beaucoup de projets urbains sont orientés vers la présentation et la consommation des arts et de la culture. Ce n’est que plus récemment que l’on voit des projets urbains incluant des lieux de production artistique. Ainsi, alors que la production artistique a jusqu’ici été associée à des espaces plus ou moins marginaux ou alternatifs, certains projets indiquent une tentative réfléchie de recentrer la production culturelle au cœur la ville.

Cependant, nous savons encore peu de choses quant aux caractéristiques de ce type de lieux planifiés, à leurs conditions d’apparition, à leurs fonctions et impacts à différentes échelles, à leurs publics (cibles), à ce qu’ils apportent à la ville et à ses habitants, et à leur structure « idéale ». Si certaines études ont montré les impacts de lieux de production artistique « spontanés », tel que la régénération – voire la gentrification – de certains quartiers, les connaissances sur les lieux de production culturelle en projet urbain sont encore minces, et il n’y a pas de modèle de projet urbain ou de cluster culturel incluant des espaces pour la création et l’expérimentation artistique sur lesquels les urbanistes et autres acteurs politiques pourraient se baser.

L’objectif de cette recherche est de mieux comprendre l’évolution des politiques urbaines culturelles et les éventuels nouveaux régimes urbains de l’art. Je vais m’attacher à voir comment et pourquoi l’art a été et est mobilisé lors de la réalisation de projets urbains. Je tâcherai de voir si on assiste, comme l’affirme Mommaas, à une nouvelle étape dans la mobilisation de la culture et des arts comme ressource pour les politiques urbaine et si l’on voit de nouveaux régimes urbains de l’art se développer, mobilisant par exemple des lieux de production artistique.

Pour ce faire, j’étudierais les projets urbains culturels réalisés et en cours de réalisation dans trois villes d’Europe : Nantes, Hambourg et Bâle. Je m’intéresserai à l’évolution de leurs politiques urbaines culturelles et à la mobilisation qu’elles font de l’art et de la culture dans leurs projets urbains culturels. Il s’agira de déterminer quels sont les facteurs et les acteurs qui contribuent à la formation de ces (nouvelles) politiques urbaines culturelles et de quelles manières ; de voir quels sont les objectifs poursuivis à l’aide de la mobilisation de l’art en projet urbain, et si l’art a un nouveau rôle en milieu urbain. Je m’intéresserai aux connaissances mobilisées et aux idées qui motivent les acteurs impliqués dans la réalisation de projet urbain mobilisant l’art. Une attention particulière sera portée à la place des lieux de production artistique en projet urbain et à leur possible mobilisation, ceci à une époque où l’économie créative et culturelle a une importance grandissante. Les positionnements des artistes face à ces (nouvelles) stratégies de culturalisation des politiques urbaines et leur implication dans ce type de projets seront également l’objet de mon attention.